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La démocratie sied-elle à l'Afrique?

La démocratie est-elle convenable pour l’Afrique ?

Je ne suis pas contre la démocratie. C’est seulement que je vois qu’elle ne fonctionne pas en Afrique pour un certain nombre de raisons. D’ailleurs comme je l’avais dit même chez les habitués comme les occidentaux il y a des problèmes. Mais voyons ce qui concerne l’Afrique.

Jacques Chirac avait dit : «  Laissez les chefs d’État Africains gagner les élections, sinon ils ne les organiseront plus. » C’est le même qui, auparavant, avait soutenu : « La démocratie est un luxe pour l’Afrique ». Est-ce que je suis de cet avis ? Absolument pas ! Je pense que la démocratie comporte en elle-même des tares que nous devons d’abord corriger.

Les mentalités : Il y a plusieurs problèmes à ce niveau.

-En se référant d’abord à ce qui vient de se passer en Amérique on voit bien qu’est-ce qui nous distingue. Les Américains qui soutiennent un candidat contribuent  financièrement à sa campagne ; En Afrique il faut que le candidat distribue  l’argent à ses partisans, et même à ses électeurs. Après l’élection il peut faire tout ce qu’il veut ; il ne risque rien. Les électeurs qui demandent de l’argent oublient que ce n’est ni un salaire, ni le profit d’une entreprise que l’on va distribuer. L’électeur qui a été payé doit, lui aussi, payer pour tout acte administratif, mais pas seulement à l’État. « Il n’y a rien sans rien » vous dira-t-on, quelle que soit  la nature de la sollicitation de l’électeur. Il suffit de voir quels sont les préoccupations des parlementaires africains pour comprendre que cette démocratie n’a aucun sens. En fait la plupart des députés sont venus pour leur propre bénéfice. Il faut revoir les lois qu’ils votent pour leur intérêt personnel pour s’en convaincre. On veut qu’après avoir été député on soit à l’abri du besoin pour le restant de ses jours. Tant pis si cela coûte cher au peuple.  C’est cette démocratie non sensée, qui ruine plus qu’elle ne développe, que je déplore.

Le népotisme : Lors de nos élections communales et même législatives on voit bien qu’il y a des candidatures qui ne tirent leur légitimité que de l’ancienneté de la famille. C’est la famille du chef qui doit toujours gouverner. Quelques fois on se retrouve avec des analphabètes pour administrer une commune ou pour voter des lois. On n’a pas besoin d’être un sorcier pour savoir que c’est la catastrophe en perspective. Du reste un autre défaut qui est imputable à la démocratie en général c’est que les élus, en réalité, ne représentent aucun corps social qui existe réellement. Pourtant il n’est pas évident que la répartition gauche droite soit encore sensée ; Il faut plutôt repenser à la question de représentation pour que, à l’Assemblée, ce soit des réalités qui sont représentées.

 -L’idée du chef. Mobutu aimait répéter : « En Afrique, le chef… » et il justifiait ainsi toutes ses dérives dictatoriales les plus absurdes. Il est effectivement à noter que nous confondons encore  Chef, Directeur, Président et Naba.  Le Président Africain est un demi-dieu qui n’accepte aucune contestation et les Africains, pour la plupart, ne savent que le vénérer ; et surtout chanter ses louanges comme le précise un ex-président de l’Assemblée du Burkina qui forcément sait de quoi il parle en ce moment. Pendant la crise qui avait suivi l’assassinat de Norbert  Zongo un adulte et intellectuel m’avait dit «  L’intérêt du pouvoir c’est  qu’on peut faire des choses tordues », en mooré «  Naama noog ya a yel kègâ ».  

-L’alternance : La majorité ne sait pas encore qu’on peut changer de chef. On n’arrive pas facilement à la compréhension que la durée est signe de stagnation. En général, on dit seulement que celui qui a duré a de l’expérience, même s’il s’agit d’une expérience calamiteuse. Ou bien on a la prétention de pouvoir juger de la capacité des gens seulement en les voyant. C’est ainsi qu’on entend beaucoup dire : «  Je ne vois pas qui peut diriger ce pays… ».  Ce manque de sérieux reste le même dans les grands pays démocratiques (même s’il s’y manifeste différemment)  parce que l’on invite les gens à choisir sur la seule base des prestations télévisuelles.  En général le peuple ne connaît pas vraiment les détails du programme des candidats ni même leur personnalité.  Beaucoup de ceux qui votent ne savent pas ce que cela veut dire. Nous pouvons corriger cette lacune avant de passer aux votes. Et comme le disait Rousseau, le concepteur de la démocratie moderne, il faut se donner les moyens de renvoyer ceux qui se révèleront incapables de conduire le peuple.

-La recherche du héros : Obama l’a dit. L’Afrique n’a pas besoin d’homme fort mais d’institutions fortes. Pourtant  les Africains son encore à la recherche de l’homme providentiel. On peut pourtant se rappeler que Mitterrand lui-même reconnaissait que l’Afrique fera deux cents ans avant de voir un homme comme Thomas Sankara.  Pourtant il le détestait et a probablement joué, lui aussi, un rôle dans son assassinat, ne serait-ce que pour avoir laissé faire (le parlement Français nous le dira).  On voit que des hommes providentiels sont venus et les Africains s’en sont débarrassés. Il n’y a que ceux qui ont réussi leur mu comme Sékou Touré (Guinée Conakry), Idi Amin Dada (Ouganda), Mugabe (Zimbabwé) qui sont parvenus à résister devenant alors de véritable monstre pour leur pays et leur peuple. Mais on peut cependant retenir comme exception Mandela en Afrique du Sud et Rawlings au Ghana. Seulement ce sont des anglophones.  A. T. Touré (Mali) qui rêvait d’entrer dans ce cercle d’exception semble avoir échoué. Il ne faut donc pas compter sur l’exception. Car un peuple qui espère un libérateur attend un dominateur.  Sankara, rappelons-le,  disait que si le peuple ne veut plus d’un système il s’en débarrasse lui-même.

Pour que la démocratie fonctionne il faut que  les hommes ne soient pas divinisés. Il faut que chacun sache qu’il doit faire de son mieux sinon le peuple le mettra dehors. Le peuple ne négocie pas les grâces d’une personne mais lui assigne une mission qu’il doit accomplir au risque de se voir remercier avant terme. Si celui qui est aux commandes sait cela on n’a pas besoin qu’il soit particulièrement honnête ou pas. Il sait qu’en cas de défaillance il sera renvoyé ; c’est pour cela qu’il va éviter les fautes lourdes qui caractérisent les pouvoir africains.

 L’Afrique doit d’abord corriger ces défauts, qui sont parfois propre à elle, parfois propre à la démocratie en elle-même, avant de prétendre  devenir le lieu où se joue l’avenir du monde.

K.B.T.

  



14/11/2012
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