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La lutte syndicale au Burkina

La lutte syndicale au Burkina.

Mercredi 31 Mars 2010, nous sommes à la Bourse du travail en réponse à l’appel des Syndicats. Nous sommes en lutte contre la vignette. Il faut bien se comprendre. Il ne s’agit pas de dire que l’on peut se passer des taxes en soi. Il s’agit de s’opposer à une double taxation du citoyen. Beaucoup de choses ont été dites pour expliquer cela. Je ne voudrais donc pas revenir là dessus. Ce qui m’intéresse c’est comment cette lutte est menée et par qui ?

Je tire la leçon de l’expérience que j’ai vécue. En effet à mon arrivée je voyais des gens en groupe sur la route mais ceux qui assuraient la sécurité portaient  des vêtements où il était inscrit : « téléthon ». J’ai pensé à une autre organisation dont je n’étais pas informé. Et comme il y avait encore un beau monde à la bourse du travail je ne me suis même pas posé de question. Je suis allé m’installer  comme tous ceux qui étaient là et j’attendais. Au bout d’un certain temps, alors qu’un professeur que j’ai vu il ya déjà quelques années m’avait rejoint nous nous sommes demandés à haute voix à quelle heure la marche allait commencer. Quelqu’un de notre voisinage nous a  informés que les marcheurs étaient partis depuis longtemps. Nous nous sommes alors demandé s’il n’était pas possible de les rejoindre. Pour cela nous sommes allés voir sur les affiches s’il y avait leur trajet pour que nous puissions nous lancer à leur suite. Sur place plusieurs personnes qui n’étaient pas au courant de notre démarche sont venues elles aussi poser le même problème.  Avec l’accord du responsable syndical qui était sur place nous avons  annoncé qu’un autre groupe allait partir sur le champ pour rejoindre les autres. Rapidement nous avons constitué un groupe de quelques centaines de personnes qui est sorti à la rencontre des premiers. Mais à peine avons-nous parcouru cent mètres que nous avons été rejoints par d’autres responsables syndicaux que nous n’avions pas vus. Ils  étaient farouchement opposés à notre initiative. Leur raison ? « Vous allez nous chercher des problèmes ». Et voilà les syndicats organisateurs de la marche ne veulent pas de problèmes ; ils ont peur des problèmes. S’il y a des problèmes ils ne pourront plus organiser de marche. Nous ne l’entendions pas de cette oreille. J’ai particulièrement insisté. Le problème qui m’a été présenté était que nous avons pris un chemin qui ne faisait pas partie du trajet qui a été indiqué sur la demande déposée. Ok ! Avons-nous réagi ;  «  indiquez-nous quel est le  trajet officiel qui vous est accordé. » Impossible, nous n’avions pas de système de sécurité et si jamais il y avait pillage cela sera un gros problème. Devant notre entêtement l’organisateur dévoile son vrai visage. «  Vous retournez ou je vous fait arrêter tout de suite. »  Certains marcheurs sont franchement déçus. Des grossièretés sont lancées  à la volée. Quelques-uns de ceux qui étaient sortis avec moi me supplient : Il ne faut pas que nous créions des problèmes quand cela n’est pas indispensable. Je décide alors de partir. Une vingtaine vient avec moi. Mais je leur demande de rester. Je m’en vais donc m’installer à un carrefour, la place des cinéastes, où je peux voir venir les manifestants.

 Je rumine en même temps l’incident. Je pense d’abord à ma propre responsabilité. Je suis venu juste à l’heure et même en retard.  Sinon j’aurais trouvé les manifestants et serais parti avec eux. L’incident n’aurait pas eu lieu. Mais il est révélateur.  Nos  leaders sont des lutteurs qui ont la peur au ventre. Ils sont prêts eux-mêmes à envoyer en prison des gens qui veulent  marcher sur leur invitation.  Ou  bien il faut comprendre qu’il y a un autre problème, un problème bien plus complexe. La réaction de ceux qui étaient avec moi à cette interdiction est bien révélatrice d’un malaise. Les syndicats ne sont pas vraiment autonomes. En réalité certains d’entre eux, et ce doit être la majorité, sont à la solde du pouvoir. C’et bien connu, on le disait mais je ne l’avais pas encore vérifié et hésitais à y accorder du crédit mais il est évident que le mouvement est récupéré. En fait au lieu de lutter, les leaders sont là pour canaliser la lutte. Il s’agit pour eux de la récupérer, de se mettre à sa tête, pour le conduire vers le néant.   Le pouvoir sait qu’il ne doit  pas empêcher les gens de crier leur mécontentement. Il faut leur permettre de manifester mais il ne faut pas que cette contestation soit effectivement revendicatrice. Il ne faut pas qu’elle soit dangereuse. Alors on infiltre les syndicats de personnes de confiance qui vont se mettre à la tête de la lutte. Nous nous rappelons que lors de la marche précédente des gens ont été arrêtés. L’Etat l’avait reconnu mais avait pris soin de préciser qu’il s’agit de personnes droguées et qui étaient en possession de la drogue pendant les faits ou qui avait reconnu  leur culpabilité après un mois d’emprisonnement. Et qu’ont fait les syndicats ? Qu’ont-ils dit ? Rien ! Le gouvernement avait tout le loisir d’imaginer les justifications qui lui convenaient. Il disculpe ainsi les syndicats, isole ces vrais marcheurs contestataires présentés ainsi comme des voyous. Pour ceux-ci c’est une vraie découverte, un vrai découragement et, au bout, un abandon de la lutte. C’est  ce que le gouvernement veut et certains des syndicats sont là pour servir ce dessein bien sûr génialement machiavélique.

Mais pourquoi ceux qui sont honnêtes dans leur revendication se laissent-ils entraver par ces suppôts ?  Voilà la question que je passe le temps à tourner et retourner.

Ou bien il n’y a que deux sortes de syndicats : Ceux qui sont achetés et ceux qui sont tétanisés par la peur. Alors peut-on parler de vraies luttes syndicales dans ce qui se passe. Ne sont-ce que des comédies, comme on nous en a déjà servies lors de précédents événements qui étaient encore bien plus dramatiques ?

K. B. T.




18/07/2010
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