La paix de Blaise
- Ce article n'est pas le nôtre mais nous le mettons ici pour toute fin utile. pour tous ceux qui ont besoin de la vraie information.
- Par
K.Sylvain SASSE
- En
février dernier (2007), les protagonistes de la crise ivoirienne signent à
Ouagadougou (Burkina Faso), un accord de paix définitif sous l égide du
médiateur à la fois pyromane et sapeur-pompier, Blaise Compaoré. Ils
mettent ainsi fin à plus de quatre ans de guerre civile. Afrique Education
révèle ici les manœuvres secrètes du département d’Etat et de l’Elysée qui
ont conduit à ces accords que les quotidiens burkinabé pro-Compaoré,
qualifient abusivement de succès diplomatiques du président du Faso.
L’article « Compaoré, Chef d’Etat
ou de la Mafia » du numéro 223 du 1er au 15 mars 2007 du magazine, s’est
vendu gloutonnement à Ouagadougou comme die brochen (petits pains). Mais ce
succès a entraîné sine dine des répliques maladroites, surtout, des chiens de
garde du pouvoir dont le quotidien gouvernemental Sidwaya. On a bien
compris son mobile, mais Afrique Education tire une fois encore sur la queue du
diable et invite ce dernier à le contredire de nouveau. D’ailleurs Blaise
Compaoré ne se jette pas les fleurs et, surtout, ne considère pas la
signature de cet accord de paix sur la crise ivoirienne comme une victoire
diplomatique. A contrario, l’homme fort de Ouagadougou est très inquiet sur son
avenir politique et sur ce qui se dessine, au sein de la commission
trilatérale, du réseau françafrique, de l’entourage du procureur Christopher
Staker du tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), une juridiction du
Tribunal pénal international, émanation de l’Organisation des nations-unies
(ONU) et, plus précisément, du tristement célèbre Conseil national de sécurité,
d’une part, et du Département de la direction des affaires économiques
internationales de la Maison Blanche, d’autre part. L’accord de paix de
Ouagadougou entre les belligérants de la guerre civile ivoirienne, de février
dernier, a mis les opinions publiques dans le trouble sur le choix du médiateur
Blaise Compaoré dans ces pourparlers. Selon nos différents faisceaux
d’investigation, le président Compaoré était contraint d’être le
médiateur pour des raisons suivantes :
- Primo, les Américains ne sont pas
contents du rôle qu’il a joué auprès de Charles Taylor et sa rébellion, le
Front national patriotique du Liberia (NPFL) du 24 décembre 1989 à 2006. Son
indéfectible soutien avait permis à l’ex-chef de l’Etat libérien de défier les
Américains sur le terrain des opérations militaires en dépit du renfort d’un
contingent US fort de 2.500 marines chapeauté par les agents de la CIA, du
Military Intelligence (M16) et du Spécial Air Service (SAS) britanniques. Dès
lors, ils sont résolus à réprimer les soutiens du Libérien, à savoir, Blaise
- Compaoré
et les réseaux français, par tous les moyens, y compris, à l’aide de la
subversion. Mais comme ils ne peuvent pas être sur plusieurs fronts à la
fois, ils ont dû, momentanément, surseoir au « dossier Compaoré »,
privilégiant le cas le plus urgent, celui de son ami Charles Taylor.
Aussi, faut-il souligner que l’ex-premier ministre ivoirien, Alassane
Ouattara, ami de longue date de Blaise Compaoré, a activé ses
réseaux aux Etats-Unis où il fut ses études de sciences économiques, et
d’Arabie Saoudite, pour apaiser cette colère de Washington à l’endroit du
chef de l’Etat burkinabé.
- -
Secondo, informé pourtant par ses réseaux de ce projet américain,
Compaoré, sûr du soutien de la France de Jacques Chirac (qui caressait le
projet de se succéder à lui-même à l’Elysée avant le verrouillage de l’UMP
par Nicolas Sarkozy), a continué à apporter son assistance à Charles
Taylor, en accentuant l’arrogance de ce dernier. Plus grave est que
l’ex-président libérien, qui comptait sur Blaise Compaoré, menace
les Etats-Unis et son président Bill Clinton : « If the president Bill
Clinton sends the troops hier, I kill them all « ( Si le président
Bill Clinton envoie ses troupes ici, je les tue toutes ).
- Ces
certitudes de Charles Taylor donna dès lors aux Américains, l’étendue de
leur guerre secrète, et changea de facto la donne géopolitique ouest-africaine.
Les Américains sont donc sûrs que la France projette quelque chose contre
eux en Afrique. Le sénat américain monte au créneau à travers le sous-
secrétaire d’Etat Georges Moose qui, devant les sénateurs, affirme
en 1993 : « Nous devons assurer notre accès aux immenses ressources
naturelles de l’Afrique, un continent qui renferme 78% des réserves
mondiales de chrome, 89% de platine, et 59% de colbalt ». Bill Clinton
promulgue, alors, deux ans plus tard, après cette déclaration, la loi
Africa New opportunities Act, qui définit les programmes d’exploration et
d’exploitation des nouvelles ressources africaines servant les intérêts
stratégiques américains. La machine de déstabilisation de tout un
continent est en marche, et tous les hommes forts de la françafrique
doivent quitter de gré ou de force le pouvoir. Ce fut le cas du Zaïrois Mobutu
Sese Seko, du chef du Maquis angolais, Jonas Savimbi, du Libérien Charles
Taylor, et bientôt du Burkinabé, Blaise Compaoré. Pourtant, la
déstabilisation du Zaïre qui a même inquiété les chefs d’Etat d’Afrique
francophone jusqu’au sage togolais Gnassingbé Eyadèma, n’a pas fait
assagir Blaise Compaoré. Au contraire, Charles Taylor,
l’ancien casque bleu des Nations- Unies, le caporal sierra-léonais, Foday
Sankoh, et lui continuaient de faire de l’Afrique de l’Ouest, une
sorte de Sicile africaine dont le chef n’est autre que Blaise Compaoré.
Plus grave, sa camora et lui, ont foulé au pied les résolutions et
rapports onusiens, et poursuivi leur crime organisé en attisant le courroux
des stratèges du State Department.
- - La
médiatisation des atrocités des guerres civiles au Libéria et en Sierra
Léone, l’appétit irrationnel des Américains à s’accaparer des ressources
naturelles africaines, ont obligé les agents de la CIA et des forces
spéciales à dramatiser leurs rapports de missions effectué de 1989 à 2002
qui dormaient dans les tiroirs de l’Agence. C’était l’émotion à la lecture
de ces rapports sur les atrocités de Blaise Compaoré et sa camora. C’est
ainsi que ces rapports ajoutés à ceux des organisations non
gouvernementales (ONG) ont atterri à la Commission trilatérale où siègent
uniquement des personnalités américaines, européennes et japonaises pour
la grande majorité. Créée en 1955 par David Rockfeller dont la fondation
sponsorise entre autres des ONG comme Human Rights Watch, qui ont fourni
au total 32.000 pages de dossier d’inculpation sur Charles Taylor et 7000
pages sur le président Blaise Compaoré, cette Commission trilatérale
dispose des moyens de sa politique. Autrement dit, Compaoré et son
vice-chef de la camora, totalisent à eux deux, au Tribunal pénal
international de la Haye, 39.000 pages d’inculpation de crise contre
l’humanité, de crime organisé, de pillages, et d’exécutions
extra-judiciaires. Le Conseil de sécurité de l’ONU qui n’est autre qu’un
commis de la Commission trilatérale, a donc initié rapidement le projet de
TSSL et un mandat d’arrêt a été lancé à l’encontre de Taylor le 4 juin
2003 et transmis à Interpol.(police internationale).
- En
2006, ce que Taylor et Blaise Compaoré considéraient comme une
blague, est devenu une réalité. L’ex-chef de l’Etat libérien est extradé à
la Haye en Hollande en dépit des protocoles d’Accra du 11 août 2003 au
niveau de la CEDEAO.
- -
Quarto, l’assassinat électoral du président français Jacques Chirac
par son (fougueux) ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy,
n’était pas de bonne augure dans la mesure où ses principaux soutiens
comme François Fillon au sein de l’UMP, annonçaient le changement
de la situation militaire en Côte d’ Ivoire entre le pouvoir en place
dirigé par Laurent Gbagbo et la rébellion de Guillaume Soro.
La percée du candidat de l’UMP dans les sondages est due aux lobbies
pro-Sarkozy composés essentiellement d’hommes d’affaires du Mouvement des
entreprises de France (Medef) qui restent nostalgiques de la Côte
d’Ivoire, et écoeurés par l’offensive économique des pays émergents tels
que l’Afrique du Sud, le Brésil et la Chine dans ce pays. Blaise
Compaoré a pris conscience du départ de Jacques Chirac et ce, par
la petite porte après 40 années de basse politique et de coups tordus en
Afrique. Nicolas Sarkozy qui est d’ailleurs pro-américain et démagogue
reconnu, n’hésiterait pas à sacrifier Blaise Compaoré et Guillaume
Soro, au profit de ses soutiens Outre-Atlantique, des patrons du CAC40
de Paris et du Medef, s’il arrivait au pouvoir, pour mettre fin à la crise
ivoirienne. C’est compte tenu de ce danger qu’un centre d’analyse proche
de l’Elysée, a conseillé à Compaoré de dire à ses amis, en l’occurrence,
le rebelle Guillaume Soro et sa clique, de déposer les armes et de
faire tout ce qui est possible pour instaurer la paix en Côte d’ Ivoire
sans quoi, il risque de tirer sur leur propre pieds. Voilà pourquoi le
chef de l’Etat burkinabé s’érige en médiateur après avoir ordonné
discrètement à ses poulains d’accepter la dernière tentative de paix avant
l’hécatombe. Une question devenue de vie ou de mort pour le beau Blaise !
- -
Quinto, le président Gbagbo, dispose aujourd’hui d’une situation favorable
et peut à loisir, embêter Blaise Compaoré dont le pouvoir commence à
sérieusement chanceler en raison de sa forte implication dans la crise
ivoirienne qui a par ailleurs entraîné une redéfinition de la donne
géopolitique, avec le rapprochement entre la Côte d’Ivoire et l’Angola,
première puissance militaire de l’Afrique centrale, et pro-américaine par
excellence). Désormais, les ONG ivoiriennes peuvent, avec l’approbation
discrète de Gbagbo, traduire Compaoré et Guillaume Soro au TPI, et
l’affaire des femmes violées par les rebelles, n’est que l’avant-goût d’un
feuilleton judiciaire en perspective.
- -
Sexto, l’entourage du procureur de TSSL, Christopher Staker, devrait dans
les mois à venir, envoyer une lettre à Blaise Compaoré, pour être entendu
dans l’Affaire Taylor, en attendant sa mise en accusation personnelle sur
les 7.000 pages de son dossier d’inculpation pour crimes organisés,
violations systématiques des droits fondamentaux de l’homme. De sa prison,
Charles Taylor ne cesse de jurer que dès sa comparution, il ne manquera
pas de citer son compagnon de toujours Blaise Compaoré.
Toutes ces raisons (et bien entendu d’autres encore) ont obligé le chef de l’Etat burkinabé à s’ériger en médiateur malgré lui. Le pyromane devenu sapeur pompier. Mais ce qui est sûr et certain, c’est que tôt ou tard, il sera cité à comparaître au TPI ou au TSSL. Comme on le constate, l’assassin de son « demi-frère », le capitaine Isidore Thomas Sankara avec cruauté en octobre 1987 et celui de notre confrère Norbert Zongo en décembre 1998, n’est pas encore au bout de ses peines.
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